Les 8 grandes cuisines régionales chinoises : un voyage gustatif à travers le pays

Les Chinois parlent des « huit grandes cuisines » (八大菜系 – Bādà càixì), huit traditions culinaires majeures, chacune avec ses goûts, ses techniques et ses histoires.
Derrière ces styles se cachent des siècles de commerce, d’influences culturelles, de climats variés… et une incroyable passion.

Je t’invite à découvrir ces 8 mondes culinaires qui racontent la Chine mieux qu’aucun livre d’histoire.

Comprendre la notion des “8 grandes cuisines”

Chaque région a développé une identité culinaire propre selon son climat, ses produits locaux et son histoire impériale.
Les montagnes, les fleuves et les routes commerciales ont façonné la façon dont on cuisine — et surtout, dont on savoure.

Autrefois, on distinguait seulement quatre grandes traditions : le Shandong, le Sichuan, le Canton et le Jiangsu.
Avec le temps, le pays s’est unifié, et les gastronomes chinois ont ajouté quatre autres piliers : le Zhejiang, le Fujian, le Hunan et l’Anhui.

La base de toute cuisine chinoise repose sur trois choses : le goût, la texture, et le contraste.
Un plat doit être équilibré : le doux adoucit le salé, le piquant réveille le fade, le croquant répond au moelleux. C’est cette recherche d’harmonie qui fait de la gastronomie chinoise une cuisine très riche et variée.

Les 8 grandes cuisines régionales chinoises

1️⃣ La cuisine du Shandong (鲁菜 – Lǔ cài) : la noblesse du Nord

Berceau de la cuisine impériale, le Shandong est considéré comme la racine des traditions culinaires du Nord de la Chine.
Ses plats sont généreux et pleins d’arômes marins. La région, bordée par la mer Jaune, regorge de crevettes, coquillages et poissons.
Les bouillons y sont puissants, les fritures croustillantes, et l’accent est mis sur la fraîcheur des produits.

Un chef du Shandong se reconnaît à sa maîtrise du feu : la friture doit être brève et explosive, pour enfermer le goût tout en gardant la texture parfaite.
Leur secret ? De longs bouillons clairs et savoureux, souvent à base de fruits de mer.

Quelques plats de la cuisine de Shandong :

• Crevettes sautées au sel et au poivre 椒盐虾 (jiāo yán xiā) : Des crevettes croustillantes et parfumées, sautées rapidement dans le wok avec du sel, du poivre et un soupçon d’ail. Simple, franc et délicieux !
• Poulet braisé du Shandong 德州扒鸡 (Dézhōu pá jī) : Un poulet entier mariné puis lentement braisé dans un bouillon parfumé aux épices. La chair devient si tendre qu’elle se détache toute seule.

2️⃣ La cuisine du Sichuan (川菜 – Chuān cài) : la danse du feu

C’est la cuisine la plus célèbre et la plus expressive de Chine.
Originaire d’une région chaude et humide, la cuisine du Sichuan joue avec le piquant 🌶️pour “réchauffer” le corps et équilibrer le climat.
Mais le secret ne réside pas seulement dans le piment, il vient aussi du fameux poivre du Sichuan qui engourdit la langue et réveille les papilles.

Le goût typique du Sichuan, appelé málà (麻辣), combine le piquant du piment et le picotement du poivre.
Les plats y sont complexes : on peut y retrouver jusqu’à neuf saveurs différentes dans un seul mets !

Parmi les incontournables, on trouve le Mapo tofu, le poulet Kung Pao, et le légendaire hot pot de Chongqing qui réunit les convives autour d’un bouillon bouillant.
C’est une cuisine de convivialité, faite pour partager.

3️⃣ La cuisine cantonaise (粤菜 – Yuè cài) : la finesse et la précision

Si tu connais les dim sum, tu connais déjà la cuisine cantonaise !
Originaire du Guangdong, la cuisine cantonaise se distingue par sa légèreté et son souci du détail.
Ici, on cherche à révéler le goût naturel des ingrédients, sans le masquer sous trop d’épices.

Les plats sont souvent cuits à la vapeur ou sautés très rapidement au wok, ce qui permet de préserver la couleur et la texture des aliments.
Un vrai chef cantonais doit maîtriser le fameux “wok hay” (气) — ce petit goût fumé obtenu quand le wok est parfaitement chaud.

Quelques plats de la cuisine cantonaise :

• Raviolis vapeur (Dim Sum) 虾饺 (xiā jiǎo) : Petites bouchées translucides à base de crevettes, cuites à la vapeur dans des paniers en bambou. Délicates et très populaires au petit déjeuner.
• Canard rôti de Canton 烧鸭 (shāo yā) : Un canard mariné et rôti jusqu’à obtenir une peau dorée et croustillante. Souvent servi avec une sauce sucrée-salée. Un classique incontournable 😍.

4️⃣ La cuisine du Jiangsu (苏菜 – Sū cài) : l’élégance sucrée des lacs

C’est la cuisine des poètes et des écrivains.
Originaire de régions bordées d’eau comme Suzhou ou Nanjing, elle privilégie la douceur et la présentation.
Les plats du Jiangsu sont souvent légèrement sucrés, mijotés longuement, et servis dans des sauces brillantes et épaisses.

Chaque assiette est un petit tableau : tout doit être beau, équilibré et délicat.
Les saveurs sont douces mais précises, parfaites pour accompagner le thé ou un vin de riz léger.

Quelques plats de la cuisine du Jiangsu :

• Boulettes “Tête de lion” 红烧狮子头 (hóngshāo shīzitóu) : De grandes boulettes de porc moelleuses, mijotées dans une sauce brune légèrement sucrée. Le nom vient de leur forme, rappelant la crinière d’un lion.
• Poisson du lac au vinaigre doux 糖醋鱼 (táng cù yú) : Un poisson entier frit, nappé d’une sauce aigre-douce brillante. Sucré, salé et acidulé à la fois : un équilibre parfait.

5️⃣ La cuisine du Zhejiang (浙菜 – Zhè cài) : la fraîcheur et la douceur

Proche de Shanghai, la cuisine de Zhejiang met à l’honneur les produits frais et les cuissons légères.
Les plats y sont colorés, équilibrés et souvent parfumés au thé vert Longjing, symbole de la région d’Hangzhou.
C’est une cuisine raffinée, qui mise sur la simplicité et la pureté.

Un repas typique du Zhejiang évoque la nature : des crevettes translucides, un poisson cuit doucement, une sauce légèrement vinaigrée.

6️⃣ La cuisine du Hunan (湘菜 – Xiāng cài) : le feu franc du cœur de la Chine 🔥

Plus directe et colorée que celle du Sichuan, la cuisine du Hunan aime les saveurs fortes et le piment frais.
C’est une cuisine de montagne et de champs, pleine de chaleur humaine.
On y fume la viande, on sale le poisson, on fait fermenter les légumes — rien ne se perd.

Chaque bouchée est un concentré d’énergie !
Le plat emblématique reste le porc rouge du président Mao, fondant et parfumé à la sauce soja sucrée.

7️⃣ La cuisine du Fujian (闽菜 – Mǐn cài) : la mer et les montagnes

C’est une cuisine poétique, née entre collines et rivages.
Les plats du Fujian sont subtils, légèrement sucrés, toujours basés sur un bouillon clair et aromatique.
La star, c’est la fameuse soupe “Bouddha saute le mur”, une merveille à base de fruits de mer, de jambon et de vin de riz.

La présentation y est élégante : les ingrédients flottent comme des perles dans un bouillon transparents.

Quelques plats de la cuisine du Fujian :

• Soupe “Bouddha saute le mur” 佛跳墙 (fó tiào qiáng) : Un plat de fête traditionnelle chinoise mythique : fruits de mer, jambon, œufs de caille et champignons mijotent dans un vin de riz parfumé. Le nom dit qu’il est si bon que le Bouddha en sortirait de son temple pour le goûter !
• Nouilles de Xiamen 沙茶面 (shā chá miàn) : Des nouilles baignées dans une soupe riche au goût de sauce satay chinoise (sésame, arachide, crevette séchée). Réconfortantes et pleines d’arômes.

8️⃣ La cuisine de l’Anhui (徽菜 – Huī cài) : la nature dans l’assiette

Rustique et montagnarde, la cuisine de l’Anhui vient du sud de la montagne Huangshan.
Les produits y sont simples : bambou, champignons, herbes sauvages, poissons de ruisseaux.
On cuisine lentement, souvent en pot de terre, pour préserver les saveurs boisées.

Le résultat : une cuisine sincère, authentique, pleine de parfums forestiers.
Un vrai voyage sensoriel dans les campagnes chinoises.

Quelques plats de la cuisine de l’Anhui :

• Poulet au bambou 竹笋炖鸡 (zhúsǔn dùn jī) : Un plat traditionnel des montagnes : du poulet mijoté avec des pousses de bambou et des champignons. Un goût boisé et doux, typique des cuisines rurales.
• Tofu aux champignons sauvages 香菇豆腐 (xiānggū dòufu) : Un tofu tendre accompagné de champignons parfumés, souvent cuits dans un pot de terre. Simple, sain et profondément savoureux.

Les philosophies culinaires chinoises

Derrière ces huit cuisines se cache une vision commune : le respect de l’équilibre.
La cuisine chinoise n’est pas seulement une question de goût, elle reflète la pensée du yin et du yang.
Elle cherche à équilibrer chaud et froid, sucré et salé, tendre et croquant.

Aujourd’hui, la nouvelle génération de chefs chinois revisite ces traditions.
Dans les grandes villes, on marie les techniques anciennes avec des présentations modernes :
un Mapo tofu en espuma, un canard rôti revisité en bao, ou une soupe du Fujian servie en verrine.

Malgré cette modernité, la philosophie reste la même : respect du produit, équilibre et harmonie.

Où goûter ces cuisines

Si tu voyages en Chine, tu peux goûter à ces styles directement sur place :
À Chengdu, les ruelles regorgent de stands de nouilles au poivre et de hot pots bouillants.
À Canton, le matin commence avec un thé et une farandole de dim sum.
À Hangzhou, les crevettes au thé vert se dégustent face au lac de l’Ouest.
À Suzhou, les plats sucrés-salés accompagnent les balades le long des canaux.
Et dans les montagnes du Huangshan, on savoure une soupe claire de bambou en admirant la brume.